Ces mois de plein été ont été très riches en enseignements pour nous ! Outre une météo pour le moins étrange au mois de juillet, ce qui arrivera de plus en plus et de plus en plus fort de toutes façons, nous avons du beaucoup nous absenter et avons eu de nombreuses visites des habitants de la forêt venus se servir au jardin… Et puis nous réalisons aussi toutes les implications de ce qui nous apparaît aujourd’hui comme de véritables erreurs.
Le jardin n’a presque rien donné, et globalement tout ce qui a poussé est resté nain ou a été mangé par les animaux. Pas de conserves en vue cette année, hormis quelques pots de coulis de tomate, seules résistantes.
Heureusement, côté fruitiers les nouvelles sont meilleures ! Les arbres plantés cet hiver ont tous pris à l’exception d’un cerisier. Le poivrier du Sichuan a été écorcé par un animal, sans doute un lièvre, mais les soins apportés ont permis de le sauver… pour cette fois. Nous le pensions plus à l’abri que ça avec ses grandes épines acérées.
Tous les arbres sont protégés des chevreuils par de la ronce et du prunelier que nous avons disposé autour de façon à former comme une cage. Cela semble bien fonctionner.
Nous partageons donc ici nos observations, essais, erreurs et réussites et espérons que cela permettra de faire gagner du temps à certain.es d’entre vous…
Le sol et le BRF
Le fait d’être confinés loin de notre terrain nous a empêché de sentir les nuits fraiches et le manque d’humidité du sol. Lorsque nous sommes arrivés sur le terrain mi-mai, nous nous sommes mis au travail et avons foncé tête baissée (ce n’est jamais une bonne idée…), pressés de repiquer enfin ces plants qui avaient déjà attendu bien trop longtemps en pots à Bordeaux.
Comme je l’expliquais dans un précédent article, nous avons répandu une épaisse couche de BRF (bois raméal fragmenté) sur nos planches fraichement grelinées, puis nous avons paillé dessus. Nous savions que le printemps n’est pas le bon moment pour amender le sol de cette façon, et que cet apport tardif et massif pouvait créer ce qu’on appelle une faim d’azote.
Nous n’avions alors pas mesuré toutes les autres implications en plus de celle-ci : le sol, sec suite à un printemps sans pluie, était trop frais pour permettre une bonne dégradation de l’apport qui n’a démarré que bien plus tard dans l’été. Les pluies suivantes ont été absorbées par le BRF et le paillage, n’atteignant que peu le sol qui est resté dur et compact en dessous jusqu’à mi-août, lorsque la matière a composté sous l’effet de la chaleur et de l’humidité.
Marc et moi ne sommes pas d’accord sur la part de responsabilité du BRF dans le « raté légumier » de cette année. Nous avons donc décidé d’expérimenter chacun de notre côté en préparant le sol au cours des mois prochain de la façon dont on le sent le mieux, pour accueillir les mêmes semences, au même endroit et au même moment. Une bonne façon d’en apprendre encore davantage ! Et bien sûr si certain.es d’entre vous souhaitent partager leur expérience, les commentaires ici ou sur les réseaux sociaux sont les bienvenus.
L’ombre
Les plantations réalisées à l’ombre des fruitiers sont celles qui se sont le mieux portées. Le reste a vraiment souffert de la chaleur.
Ce constat nous conforte dans l’idée d’aller vers un jardin-forêt : le changement climatique apporte son lot de canicules qui deviendront sans doute la norme de nos étés à venir, et tenter de mettre à l’abri de ce soleil brulant les plus « fragiles » des plantes, c’est à dire les annuelles, nous semble cohérent. Bien entendu, cela ne vaut que si les arbres plantés supportent eux-mêmes nos futures conditions climatiques… Et sur ce point, personne ne pouvant faire de prévision fine, eh bien toutes les tentatives sont les bienvenues.
« Le meilleur moment pour planter un arbre était il y a 20 ans. Le Deuxième meilleur moment est maintenant »
Proverbe chinois
Dans ce super documentaire sur la vie sans pétrole à Cuba dans les années 90′ et la façon dont l’île s’est convertie aux micro-fermes bio, la question de la gestion de l’ombre est bien évidemment abordée (à 28’10 »). Les serres sont couvertes d’un filet aux mailles suffisamment serrées pour réduire l’ensoleillement et la quantités de rayons UV pénétrant à l’intérieur, protégeant ainsi les plantations. Une technique à dupliquer ? La mise en place de canisses est également une option que nous envisageons pour protéger les jeunes arbres, en lieu et place de nos cagettes très moches mais qui ont fait le job pour cet été.
L’eau
S’il est une ressource qui nous a manqué, c’est l’eau. Parce que pour le peu que nous arrosons encore, le faire avec de l’eau de pluie serait bien plus cohérent qu’avec de l’eau de ville.
Nous avons toute une pépinière d’arbres qui attendent cet hiver pour être plantés dans la future haie qui délimitera notre parcelle et celle du voisin. Et les arbres en pot, ça sèche très vite…
Nous avions prévu une installation de nos cuves enterrées mi-juillet, mais notre terrassier a eu un problème de santé et nous avons du repousser à cet automne. À l’occasion de cette intervention, il devait également creuser la mare du potager, exutoire final du trop-plein. Tout ceci est donc décalé, et nous fait réaliser encore davantage à quel point l’eau est un sujet d’importance dans un projet de ce type.
Clôture or not clôture ?
Les visites des chevreuils ont commencé mi-juillet, juste avant notre départ en vacances. Ces cervidés ont fait beaucoup de mal au jardin, puisqu’ils ont croqué la quasi totalité des jeunes pousses : tournesols, betteraves, blettes, cornichons, courges, courgettes, maïs, chou kale, fraisiers, framboisiers…
Nous avons tenté de les protéger la veille de notre départ en installant du prunelier autour de nos plants préférés et des plus prometteurs. Cette technique fonctionne bien.
chou kale cornichons fraisiers
Las, ce sont les blaireaux qui ont pris le relais des chevreuils… Ils fouillent le sol, le paillage également, à la recherche de leur repas nocturne. L’été, ils aiment particulièrement se nourrir de petits fruits (comme les fraises…) et de racines (les poires de terre, topinambours, pommes de terre, patates douces…) en plus des vers de terre et petits rongeurs.
Intriguée par ces animaux que je ne connaissais pas bien, j’ai fait quelques recherches et ainsi appris qu’ils sont de véritables terrassiers, capables de déplacer 40m3 de terre lors de la construction de leur terrier ! Le terrier principal est amélioré et agrandit au fil des ans. Un peu comme une maison familiale.
Il est très fortement probable que la prolifération des mulots et autres petits rongeurs logeant dans le roncier et les herbes hautes du verger constitue un garde-manger de prédilection pour les blaireaux, en plus de notre jardin et des chênes environnant.
Bref, nous sommes dans de beaux draps.
Et nous avons décidé de clôturer.
Notre projet est depuis le début inscrit dans une dynamique d’autonomisation. Nous avons vu nos dépenses alimentaires augmenter sans cesse ces dernières années, les rayons de fruits et légumes (bio) se réduire à peau de chagrin et leur qualité baisser considérablement.
Aller vers une part importante d’autonomie alimentaire, c’est s’offrir de la variété, du goût, de la fraicheur, une plus grande qualité nutritionnelle, et une source de satisfaction simple et renouvelable. L’Abondance en fait.
Protéger le fruit de notre travail, se donner une chance de réussir et de partager cela avec d’autres, nous paraît essentiel.
C’est la raison pour laquelle nous allons clôturer la partie potager de notre projet, à peu près de cette façon :

Lorsque nous vivrons sur place, nous clôturerons sans doute également le reste du verger, et une partie de la prairie à l’Est de la haie fruitière, qui seront fermées au moins quelques semaines dans l’année. Cela nous permettra d’y installer des chèvres ou des moutons (pas forcément les nôtres), et ainsi d’entretenir la prairie sans moteur bruyant, énergivore et maltraitant pour la faune (allez faire un tour chez Éric Lenoir, auteur du petit traité du Jardin Punk, pour voir de quoi on parle…).
Voilà, nous en sommes là en cette rentrée qui a été bien mouvementée pour nous, loin de notre chez-nous Périgourdin que nous avons hâte de retrouver.
La prochaine étape côté jardin est la mise en place de la mare et celle de la clôture, dans le courant de l’automne normalement. À suivre !