#3 Les cadres canadiens

Une fois les fondations et le muret de soubassement réalisés, c’était au tour de l’ossature bois du bâtiment de prendre forme.

N’étant charpentier ni l’un ni l’autre, nous avons choisi une technique qui nous semblait facile à mettre en œuvre en tant qu’auto-constructeurs : celle des cadres canadiens.

Ce système consiste à réaliser un cadre d’ossature tous les 60cm (quand on respecte le DTU du bois, mais nous en avons vu tous les 80cm également et nous aurions pu partir là-dessus), à la façon d’une coque de bateau. Les cadres sont assemblés au sol, puis ils sont levés à la main à l’aide d’un simple palan… et à la force des bras !
Au fur et à mesure que les cadres sont levés, on les maintient entre eux avec un contreventement provisoire, dans notre cas grâce aux lattes du futur bardage.

La mise en œuvre

Pour effectuer ce travail correctement et limiter les risques de mauvaises surprises, quelques précautions sont à prendre :

  1. aménager un poste de travail incluant des cales de repère des coupes, évitant ainsi les mesures et permettant un travail à la chaîne.
  2. réaliser un gabarit (une épure) sur lequel on vient ensuite assembler les pièces. Cela permet de n’avoir que très très peu de jeu d’un cadre à l’autre, ce qui ne serait pas le cas en assemblant les cadres sur simple prise de mesure (on répète également la même erreur d’un cadre à l’autre !).
  3. ce gabarit constituera ensuite le premier cadre à lever. Il faut donc penser l’emplacement de ce poste de travail au plus près de la zone finale de levage.
  4. assembler les cadres dans l’ordre inverse de leur pose, de façon a avoir dessus les premiers à lever. La question ne se pose pas si tous les cadres sont identiques. Dans notre cas, il y avait 3 types de cadres : les pignons qui sont aussi les cadres avec solivage pour accueillir le plancher de la mezzanine, les cadres pleine hauteur sans emplacement fenêtre, et les cadres pleine hauteur avec emplacement fenêtre.
  5. disposer des cales sur la lisse basse, qui permettront de contrôler l’implantation en levant les cadres en butée. Elles resteront en place.
  6. utiliser des sangles et cordes très résistantes pour le levage. Ce n’est pas le moment de se faire tomber un cadre dessus !

Le choix du bois

Nous avons opté pour du bois brut (non raboté) en 5×20 et 5×15 que nous avons chanfreiné nous-même.

Le chanfrein constitue la découpe de l’arête de la pièce de bois. Il est optionnel mais tout de même fortement conseillé car c’est lui qui réduit la vitesse de propagation du feu : une arête non chanfreinée est si fine qu’elle s’enflamme très facilement.

Nous aurions pu opter directement pour du « bois d’ossature » (entendez par là un bois chanfreiné et raboté 4 faces en sections standard pour la construction). Le hic : nous étions à la bourre… La scierie n’avait pas le temps de nous le faire, il nous aurait coûté plus cher, et les revendeurs de bois ne le proposent par défaut que traité. Et bosser du bois traité, ça ne nous plaît pas du tout…
Nous avons donc utilisé du mélèze et du douglas purgés d’aubier donc naturellement classe 3.

Bon par contre le bois brut vrille, banane, tuile, malgré le séchage préalable. L’idéal est donc d’obtenir la livraison juste au moment de démarrer le chantier afin de travailler un bois bien droit qui travaillera une fois assemblé, et non l’inverse.

Travailler le bois brut n’a cependant pas que des inconvénients : il faut dire que la structure est très belle ainsi ! Et puis nous avons récupéré les copeaux et la sciure afin d’alimenter les toilettes sèches du chantier, ce que nous n’aurions pas fait avec du bois traité. Les petites chutes non exploitables finiront elles dans le poêle à Bordeaux.

Au sujet du traitement du bois – notre expérience nous apprend que le « non-traité » est en réalité quasiment toujours traité (!) dans une scierie traditionnelle, au moins à l’anti-bleu.
Avec une scierie locale, il est néanmoins possible d’anticiper et de demander à ce que tel lot reste non traité. Nous vous engageons à poser la question de façon insistante pour obtenir une réponse claire, ou à travailler avec une scierie engagée comme Aux Bois Verts du Périgord que nous avons choisie.

Le timing

La découpe des pièces a été une phase bien plus longue que prévue. Lors de la préparation de notre chantier avec Lionel, nous n’avions pas du tout compris qu’il ne serait pas possible de faire cela seul.e. C’était sans compter le poids des pièces de bois à déplacer sur le banc de coupe…
Nous avons donc du jongler avec les mini-chantiers participatifs et heureusement un mois d’août riche en visites pour avancer. Mais cela nous a tout de même pas mal retardés.
Pour mener à bien cette phase, il faut être minimum 2 à bosser, et surtout il faut avoir bien préparé la commande à la scierie. Là aussi, pressés par le temps, nous avons validé trop vite la commande et avons donc validé des erreurs qu’il nous a ensuite fallu rattraper. M a passé quelques soirées à re-calepiner pour optimiser au maximum les découpes.
Découper les 20 cadres a pris 6 jours.

La réalisation du gabarit a pris presque 2 journées : planté de pieux de soutien, reconstitution du premier cadre et mise en place des cales permettant les ajustements ultérieurs sur le cadre. C’est Lionel et Adrien qui s’y sont collés pendant que nous achevions le muret de soubassement.

L’assemblage ensuite, a également pris pas mal de temps car certaines pièces devaient être coupées directement sur le gabarit. Et puis le bois légèrement vrillé compliquait également la donne. Il a fallut 6 jours pour en venir à bout.

L’ensemble des pièces est assemblé au cloueur pneumatique. Et vu le nombre de clous déjà plantés, nous ne regrettons pas cet achat. Hanitra nous avait confectionné des gabarits de clouage en carton qui se sont avérés très utiles et permettent eux-aussi de gagner du temps. L’engin est lourd mais puissant et la sécurité bien pensée même si cela n’a pas empêché M de se blesser avec, sans gravité heureusement.

Après tout ce travail, le levage.
C’est une étape très gratifiante car c’est celle qui permet de voir le bâtiment prendre forme de façon assez spectaculaire : le matin il y a 3 piles de cadres au sol, et le soir le squelette du bâtiment est en place !
Nous avons adoré l’ambiance de cette phase, d’autant que nous l’avons menée avec l’aide de nos voisins et du père de M, comme d’antant lorsqu’une maison se construisait dans le hameau.

Une fois le bâtiment levé, nous passions à un travail de charpente et de couverture. Ce sera l’objet d’un prochain article, celui-ci étant déjà bien assez long !

2 réflexions sur “#3 Les cadres canadiens

  1. Je viens de lire tous les billets concernant le projet 413. J’ai adoré. Merci pour le partage et l’inspiration.

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